12- Le haut fonctionnaire, traître inévitable ? Le cas de l’administration parlementaire française (1789-1939)

Pierre Michon

Entre l’administration et la politique, la frontière est souvent ténue, particulièrement dans les hautes fonctions – diplomatiques, préfectorales – et singulièrement dans les périodes troublées. Servir ses intérêts et ceux de sa famille, servir un protecteur ; servir ses idées ou encore servir l’État : ces différentes fidélités peuvent entrer en conflit ou se confondre, au point de mettre en cause la neutralité du haut fonctionnaire. L’administration parlementaire permet d’éclairer ces enjeux à l’échelle du long XIXe siècle, de la Révolution française à la veille de la Seconde Guerre mondiale. Distincte, dès l’origine, des secrétariats particuliers des représentants, elle se compose de services destinés à assurer la bonne marche matérielle et juridique des assemblées législatives. Ses gradés se trouvent au plus près des politiques. Or, au cours d’un siècle scandé par des révolutions, des changements de régime et des crises gouvernementales, ils se signalent souvent par leur longévité bureaucratique ; et, en bonne logique, on les dénonce périodiquement comme des « girouettes ». Serviteurs de l’institution parlementaire ou traîtres politiques ? Simples exécutants ou détenteurs masqués d’un pouvoir considérable, à l’abri des soubresauts électoraux et révolutionnaires ? Garants de la continuité et de la neutralité de l’État ou représentants de cette « France de l’extrême centre » étudiée par Pierre Serna, aux convictions bien plus affirmées qu’elle ne veut le faire croire ? À travers les personnalités, les réseaux, les carrières et les engagements partisans de ces « inamovibles » du Parlement, l’on se propose d’examiner la trahison politique au prisme de l’administration.

Mots clés. haut fonctionnaire, administration parlementaire, trahison, loyauté, (devoir de) neutralité, inamovibilité. Pierre Michon, Les Cahiers d'AGORA

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